Communiqué Collectif Justice des enfants: abandon du CJPM

Depuis deux ans nos organisations s’opposent à l’abrogation de l’ordonnance du 2 février 1945 qui régit la justice des enfants. Le 2 février dernier, nous fêtions les 75 ans de ce texte fondateur et innovant issu du Conseil National de la Résistance, qui a posé les jalons d’une justice des enfants dans laquelle l’éducation doit primer sur la répression. Déjà 40 fois amendé pour le rendre toujours plus répressif, l’actuel gouvernement a signé sa mise à la retraite d’office sans concertation, dans une urgence artificielle en édictant, par ordonnance du 11 septembre 2019, un Code de la Justice pénale des mineurs (CJPM) censé entrer en vigueur, après ratification du Parlement, le 1er octobre 2020. Ce code qui se veut « à droit constant » et dont les objectifs affichés étaient d’améliorer la lisibilité et la rapidité de la justice des enfants, ne fait qu’affirmer les politiques répressives de ces 20 dernières années.

Mais voilà que survient la crise sanitaire. Si déjà les services de la justice de l’enfance pouvaient s’inquiéter du maintien de l’échéance du 1er octobre 2020, il est désormais certain que personne ne sera prêt à temps.

La Garde des Sceaux souhaite reporter l’entrée en vigueur de ce texte de quelques mois. Mais ces « quelques mois », même une année, ne suffiront pas.

Car l’urgence sanitaire actuelle a mis en exergue que les politiques d’austérité de ces 30 dernières années ont eu un effet dévastateur sur les services publics en général. Elle est venue exacerber toutes les difficultés déjà criantes, que nous avons maintes fois signalées, dont le manque de moyens humains et financiers.
La prise en charge des enfants en danger n’est non seulement pas une priorité politique mais a servi de variable d’ajustement des budgets. Que cela soit en prévention, en protection ou en matière pénale, l’enfant en difficulté a été sacrifié. La détresse des professionnels intervenant dans le champ de l’enfance en danger et la dégradation de la prise en charge des enfants sous main de justice sont les conséquences directes de ces choix politiques.

Ainsi la priorité n’est pas la mise en œuvre, même différée, du Code de la justice pénale des mineurs mais bien de redonner les moyens humains et matériels à l’ensemble des acteurs et actrices de l’enfance en danger pour assurer pleinement les missions de protection de l’enfance.

Dans l’urgence, les professionnels ont montré qu’il était possible, avec les textes dont nous disposons déjà, de faire autrement que le tout répressif prôné depuis 20 ans maintenant : diminution drastique du nombre d’enfants en garde à vue, et donc présentés en justice, alternative aux poursuites, sorties de détention…
Ces initiatives ont démontré que le projet que nos organisations portent depuis le début est réaliste, réalisable et souhaitable et que la réforme envisagée n’est pas utile pour y parvenir.

Si nous avons pu changer notre rapport à la justice des enfants depuis le confinement, nous pouvons le faire durablement.

Aussi, nos organisations, des personnalités et des professionnels de l’enfance en difficulté, demandent l’abandon pur et simple du Code de la justice pénale des mineurs.

Il est temps de construire un projet plus ambitieux, celui d’un Code de l’enfance, en matière civile comme pénale, qui puisse rendre à l’ordonnance du 2 février 1945 sa visée éducative et protectrice et se donne les moyens de mettre en œuvre une justice humaniste, bienveillante, sociale et éducative, dans l’intérêt supérieur des enfants, considération primordiale consacrée par l’article 3 de la Convention Internationale des Droits de l’Enfant, depuis plus de 30 ans.

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Quand on veut, on peut !

Une autre justice des enfants

[ Communiqué commun ]

680 adolescent.e.s incarcéré.e.s au 22 avril 2020 contre 816 au 1er janvier.

Nos organisations entendent saluer cette diminution significative qui n’avait pas été atteinte depuis plusieurs années. Cette situation, si elle est à mettre en lien avec la situation de crise sanitaire n’est pas directement liée aux dispositions prises par l’ordonnance portant adaptation de règles de procédure pénale sur le fondement de la loi du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19, puisque les dispositions pour appeler à un nécessaire désengorgement des prisons concernaient essentiellement les personnes condamnées. Or, 80 % des enfants sont écroués dans le cadre de la détention provisoire, c’est-à-dire avant d’avoir été jugés. Cette diminution intervient dans le cadre inédit d’une urgence sanitaire durant laquelle les parloirs famille ont été interrompus, les promenades et les médias éducatifs très fortement limités, la scolarité ajournée. Ainsi des alternatives à l’incarcération ont été trouvées et acceptées, il existe donc bien une autre voie que celle de la privation de liberté !

Au regard des possibles lors de cette période de crise, nos organisations souhaitent rappeler que la détention des mineurs n’est pas une solution. Elle ne doit être envisagée qu’après avoir épuisé toutes les solutions éducatives telles que l’ordonnance du 2 février 1945 le rappelle dans son préambule.
Si aujourd’hui, la détention a pu atteindre ce niveau c’est bien que nous avons collectivement les moyens de construire des réponses autres adaptées aux mineurs et à leurs besoins.

Il faudra nécessairement en tirer des conséquences au-delà du confinement.

Cette baisse est également à mettre en lien avec la diminution radicale du nombre de déferrements durant les premières semaines de l’urgence sanitaire, du nombre de déférements, porte d’entrée vers la sévérité et d’accélération de la réponse pénale.
Nos organisations souhaitent néanmoins alerter sur le fait que majoritairement les enfants présentés devant le juge des enfants depuis la 2ème semaine de confinement le sont dans le cadre d’un nouveau délit : celui de violation réitérée des mesures de confinement.

Outre le caractère juridiquement discuté d’une telle infraction, nous dénonçons que la loi instituant ce délit ne différencie pas les majeurs des mineurs. Elle nie les spécificités inhérentes à l’adolescence, encore plus celle l’adolescence en difficulté et l’impact des règles du confinement sur les familles les plus précaires.
Si déjà habituellement, la présentation d’un enfant devant le juge des enfants dans le cadre du défèrement met la focale sur l’acte davantage que sur la problématique de ce ou cette jeune, d’autant plus en ce moment, cette procédure doit rester exceptionnelle et être réservée aux situations les plus graves.

La justice pénale des enfants doit avant tout être protectrice, éducative, humaniste et émancipatrice car ils sont la richesse et le devenir de notre société.

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Ordonnance du 2 février 1945 « mise à la retraite d’office »

Mobilisons nous pour la justice et la protection des enfants

[ communiqué du collectif pour la justice des mineurs – 21 janvier 2020 ]

Le combat citoyen actuel pour la justice et l’égalité est aussi celui d’un autre avenir pour toutes et tous y compris celui de nos enfants.

C’est celui pour la justice et la protection des enfants en danger.

Alors que l’ordonnance de 1945, relative à l’enfance délinquante devrait fêter le 2 février 2020 son 75ème anniversaire, le gouvernement a décidé de façon autoritaire sa « mise à la retraite d’office », pour la remplacer par un tout jeune projet de « code de la justice pénale des mineurs », sacrifiant au passage l’avenir de la jeunesse.

Ce sacrifice de la primauté de l’éducatif se fait au profit d’une justice toujours plus expéditive et sécuritaire, sans garanties suffisantes des droits de l’enfant. Et toujours avec les mêmes méthodes : sans réel débat démocratique !

Il ne s’agit pas de dire que la justice des enfants telle qu’elle existe aujourd’hui, avec une ordonnance de 1945 maintes fois modifiée, fonctionne parfaitement.

Au contraire, nos organisations dénoncent depuis longtemps :

  • Le dévoiement des principes fondateurs de l’ordonnance, au profit d’une accélération de la procédure et d’une répression accrue ;
  • Le recours massif à l’enfermement des enfants (894 enfants incarcérés au 1er juillet 2019 dont 80% en détention provisoire) ;
  • Le manque criant de moyens matériels et humains pour la protection et la justice des enfants ;
  • Un système de protection de l’enfance de plus en plus défaillant, avec une prévention auprès des familles et des enfants de plus en plus inexistante ou axée sur du contrôle social.

Néanmoins, il est certain que le projet de code de la justice pénale des mineurs qui met l’ordonnance de 1945 à « la retraite d’office » ne fera qu’aggraver les problématiques actuelles. Ces constats sont d’ailleurs partagés par la Commission Consultative des Droits de l’Homme et plus récemment par le Défenseur des Droits.

Nos organisations défendent une justice éducative et bienveillante qui considère que les enfants qui commettent des actes de délinquance sont avant tous des enfants en danger. Cette justice ne peut exister sans un service public de la protection de l’enfance fort et avec des moyens donnés prioritairement à la prévention.

La justice et la protection des enfants nous concernent toutes et tous que nous soyons professionnels, parents, élu.es, membres de la société civile…

Le lundi 3 février 2020, alors que des parlementaires doivent visiter des services concernés partout en France, nous invitons à des interpellations des salariés et des élus, à des rassemblements, actions de toutes sortes pour la justice et la protection des enfants.

Nous appelons à faire du 75ème anniversaire de l’ordonnance de 1945 un moment de forte mobilisation et organisons le samedi 1er février 2020 Place de la République à Paris de 12h à 16h un grand événement.

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PJJ : conflit social à l’établissement de placement éducatif de Paris !

Les personnels en grève le 12 novembre 2019

Cela fait maintenant trois ans que l’équipe éducative de l’EPE Salomon de Caus à Paris connait une situation de souffrance au travail, depuis la prise de poste en septembre 2016 de la directrice de service.
Rapidement, les professionnels de l’établissement alertaient la médecine du travail et les organisations syndicales.
La direction territoriale de Paris répondait fin 2018 en annonçant la mise en place d’un dispositif de soutien et d’accompagnement de l’équipe, qui a été effectif de janvier à septembre 2019.
Auparavant, une psychologue du travail avait rencontré l’ensemble des membres de l’équipe et rendu un rapport de 34 pages où il était stipulé que les risques psycho-sociaux étaient maximaux au sein de l’établissement.
Une audience intersyndicale à la DT de Paris le 4 février 2019 n’aboutissait à rien. Il était rappelé par la DT aux professionnels présents que le dispositif de soutien mis en place représentait un coût très conséquent dans le budget territorial et que s’il ne portait pas ses fruits un contrôle de dysfonctionnement serait envisagé !
La situation n’a guère évolué depuis que ce dispositif a été déployé. Le stress et la souffrance au travail sont toujours présents, voire ils ont augmenté, car les solutions envisagées par la DT de Paris voulaient faire croire que les difficultés provenaient de dysfonctionnements au sein de l’équipe de professionnels. Or, elles prennent leur source dans les méthodes managériales déployées par la directrice de service, ses décisions à l’emporte-pièce en dehors de toute concertation qui vont jusqu’à mettre parfois en danger les adolescents et les professionnels ainsi que ses réactions intempestives empreintes de violence verbale et colérique.

Aujourd’hui, les professionnels de l’EPE Salomon de Caus, unique foyer à Paris, disent stop à cette violence subie.

Le SNPES-PJJ/FSU, la CGT PJJ et Solidaires-Justice les soutiennent dans leurs revendications et déposent un préavis de grève pour le 12 novembre 2019.

Les professionnels de l’EPE attendent des réponses concrètes et revendiquent :

  • Qu’une mesure conservatoire soit prise pour la réinstallation du verrou de la porte d’entrée du foyer, afin d’assurer la sûreté des jeunes et des adultes présents, en attendant les nécessaires travaux de mise en conformité du bâtiment aux normes incendie. Les éducateurs observent depuis le retrait du verrou une recrudescence de fugues et d’intrusions. Ils exercent ainsi leurs missions dans des conditions de travail anxiogènes, notamment la nuit où les services ne sont quasiment pas doublés.
  • La réorganisation des astreintes avec une réelle implication de la directrice lorsque celle-ci les assure et une équité de traitement dans la répartition des astreintes selon des critères rationnels. Depuis un certain temps, la Directrice se montre difficilement joignable (voire ne répond pas du tout) lorsqu’elle est contactée dans le cadre de l’astreinte, laissant l’éducateur de service gérer seul la situation compliquée à laquelle il fait face.
  • L’accès au bilan de l’accompagnement d’équipe qui s’est terminé en septembre 2019.
  • L’arrêt immédiat de la violence verbale et psychologique qu’ils et elles subissent au quotidien dans l’exercice de leurs fonctions qui se traduit par des hurlements, des injonctions, du dénigrement, des humiliations, des menaces de sanctions… Plusieurs agents alternent entre l’angoisse, la colère, le burn out, demande de mutation non désirée, arrêts maladies, pleurs, idées suicidaires….

Les professionnels veulent travailler dans les meilleures conditions possibles afin d’œuvrer correctement à la prise en charge des jeunes !
Ils sont en droit d’être entendus.

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Le projet de code de la justice pénale des mineurs : des propositions inadaptées pour lutter contre l’enfermement des enfants

Communiqué de presse

Au 1er juillet 2019, 882 adolescent.e.s étaient incarcéré.e.s, chiffre jamais atteint depuis plus d’une vingtaine d’années. Il faut y ajouter le nombre d’enfants placés dans l’un des 52 centres fermés, ceux placés en psychiatrie ou en centres de rétention, ainsi que le chiffre gris des jeunes condamnés en tant que majeur.e.s pour des faits commis du temps de leur minorité.

Pourtant, la Garde des Sceaux et la Direction de la Protection Judiciaire de la Jeunesse avaient assuré que certaines mesures d’application immédiate introduites dans la loi de programmation 2018-2022 de réforme pour la Justice du 23 mars 2019, permettraient une diminution du nombre d’enfants placés en détention provisoire, notamment grâce à l’encadrement des conditions de révocation du contrôle judiciaire et à la réduction de la durée du maintien en détention provisoire des mineur.e.s de 13 à 15 ans une fois l’instruction terminée. Force est de constater que ces mesures n’ont eu en réalité aucun impact.

Que dire alors du projet de code de la justice pénale des mineurs déposé le 11 septembre 2019 en Conseil des ministres, dont la diminution de l’incarcération des mineur.e.s est l’un des objectifs affichés ?

Si ce projet se présente comme « innovant » et « tourné vers l’éducatif », il ne prévoit en réalité aucune mesure susceptible de renverser véritablement le paradigme de ces dernières années, à savoir l’augmentation des mesures répressives et expéditives à l’égard des enfants. Il ne fixe aucun âge effectif d’irresponsabilité pénale de l’enfant. Il fait abstraction de ce que l’enfant mis en cause est d’abord un enfant en danger. Il confond rapidité et efficacité. Il ne garantit aucunement le retour à l’application effective des principes fondateurs de l’ordonnance du 2 février 1945, à valeur constitutionnelle, et particulièrement celui de la primauté de l’éducatif sur le répressif.

Pire encore, les missions éducatives qui consistent à accompagner un enfant dans toutes les dimensions de sa problématique pour participer à sa sortie de délinquance sont amenées à disparaître au profit d’une mesure probatoire de mise à l’épreuve contrainte dans un délai particulièrement réduit, à visée principalement comportementaliste.

Sortir de la logique des politiques répressives qui se sont accumulées au fil du temps et faire le choix de l’éducation, c’est remettre radicalement en cause la logique de l’enfermement des mineur.e.s. Cela nécessite de passer par la déconstruction d’un certain nombre d’idées reçues sur la justice des enfants selon lesquelles les délinquant.e.s juvéniles seraient plus nombreux.ses, plus jeunes et plus violent.e.s qu’autrefois, préjugés que même les statistiques du ministère invalident.

Un enfant qui passe à l’acte est avant tout un enfant en danger. Il ou elle est une personne en construction qui a besoin d’être entouré par des adultes en qui il ait suffisamment confiance pour trouver une légitimité au cadre qui lui est imposé et l’envie ainsi que les ressources nécessaires pour s’insérer socialement. Pour cela, la justice des enfants a surtout besoin de temps et de moyens tant financiers qu’humains et d’une réforme humaniste et émancipatrice fondée sur la protection et l’éducation. C’est cela que nos organisations continueront de défendre au travers de la mobilisation contre ce projet de Code de la justice pénale des mineurs.

Signataires: SM, SAF, SNPES-PJJ/FSU, CGT PJJ, LDH, OIP, CGT SP, SNUTER, SNUASFP, SNEPAP, GENEPI, DEI-France, CGT, FSU, Solidaires, Solidaires Justice, FCPE75, Avocats du barreau de Paris, CNB

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