Un refus de télétravail doit être précédé d’un entretien et motivé. La motivation des décisions est une garantie des droits des agents.
C’est ce qu’a dû rappeler le tribunal administratif de Cergy-Pontoise à l’administration défaillante dans un jugement du 29 février 2024, relatif à une décision de refus de télétravail opposé à un personnel d’insertion et de probation, au seul motif de sa quotité hebdomadaire de travail (temps partiel).
La lecture du jugement nous confirme que les textes opposables aux agent.es sont les lois et décrets régissant le télétravail. Les circulaires et autres notes de services prises en application de ces lois et décrets ne constituent au mieux que des décryptages et consignes de bonne gestion. En aucun cas elles ne peuvent contredire ni la lettre ni l’esprit de ces textes normatifs ni, encore moins, permettre à l’administration de s’affranchir des droits et garanties dont bénéficient les agent.es.
Après avoir rappelé que tout « refus opposé à une demande initiale (…) de télétravail formulée par un agent exerçant des activités éligibles (…) ainsi que l’interruption du télétravail à l’initiative de l’administration doivent être précédés d’un entretien et motivés », le juge administratif a annulé la décision de refus de télétravail considérant que, s’étant abstenue de respecter ses propres obligations, l’administration avait privé l’agent.e de ses droits et garanties.
Au ministère du droit, ça la fout mal…
Contrairement aux allégations du Secrétariat général, auteur d’un affligeant et bien tardif mémoire en défense, cet entretien et ces motivations sont des garanties de l’agent lui permettant d’avoir l’assurance que sa demande a été examinée au regard de sa situation individuelle, de ses missions et activités propres, et que le refus éventuel se fonde réellement sur des motivations sérieuses ou des nécessités de services précisées et contextualisées à sa situation, comme l’a d’ailleurs rappelé dans ses conclusions le rapporteur public, lors de l’audience.
Et non de manière générale ou pseudo égalitaire. Quid de l’équité, si chère au DISP de Paris ?
L’édiction arbitraire et non explicitée (telle que dans les instructions du DISP de Paris) d’une quotité hebdomadaire de travail minimum et absolue pour pouvoir bénéficier de jour(s) de télétravail ne constitue en aucun cas une motivation en elle-même et ne justifie d’aucune nécessité de service avérée et démontrée qui permettrait d’affirmer que l’ensemble des agent.es à temps partiel, indistinctement de leur situation propre, ne pourraient pas bénéficier d’un nombre de jours de télétravail au moins strictement proportionnel à leur temps de travail, comme le prévoit pourtant la circulaire ministérielle sur le télétravail.
En réalité, en application des textes, tout.e agent.e peut faire une demande de télétravail jusqu’aux trois jours maximum prévus par le décret fonction public. Chaque refus, total ou partiel, devra faire l’objet d’un entretien au cours duquel les motivations, sérieuses et démontrées, seront explicités à l’agent.e.
Toutes notes entendant gérer de manière générale les demandes de télétravail ne peut avoir qu’une portée juridique très limitée et surtout ne dispense l’administration ni d’étudier chaque demande au regard de la situation professionnelle individuelle de chaque agent.es, ni de la motiver selon les mêmes principes.
Le télétravail est une modalité d’organisation individuelle du travail qui doit s’inscrire dans une organisation de service repensée et adaptée.
A la DAP comme ailleurs, nous attendons toujours cette véritable intégration du télétravail dans les méthodes et organisations collectives de travail.
Et si la première étape était le retour de la confiance ?
[ Tract de l’intersyndicale « idf » CGT-IP, SNEPAP-FSU et SOLIDAIRES-JUSTICE ]
Suite à l’intervention meurtrière d’un fonctionnaire de police à Nanterre ayant conduit au décès d’un jeune de 17 ans, le 27 juin dernier, notre pays traverse une grave et profonde crise politique et sociale.
Dans ce contexte, outre les évènements survenus aux CP de Fresnes et Réau, deux SPIP franciliens (91 et 93) ont été les cibles de jets de projectiles incendiaires dans la nuit du 29 au 30 juin dernier. Nous exprimons notre solidarité et notre soutien à nos collègues. Si nous avons bien sûr une pensée pour toutes celles et ceux qui ont été directement touché.es par ces actes, nous nous étonnons en revanche de l’état de sidération qui a pu régner par la suite dans les services.
En effet, si nous comprenons les mesures prises en urgence suite aux incendies partiels des locaux des SPIP 91 et 93, il n’en demeure pas moins que nous nous interrogeons sur la manière dont les activités des SPIP ont été mises en suspens. Les ordres sont comme toujours descendus depuis la DI, sans aucune prise en considération des contextes locaux. Le ressenti des personnels ? Leur vécu de la situation ? Le degré de risque était-il le même partout, pour toutes et tous ? Aucune de ces questions ne nous a été posée, encore à ce jour !
Force est de constater que, une fois encore, les consignes sont parvenues sur le terrain verticalement et au compte-goutte, en laissant apparaître un traitement inéquitable entre les différents corps de métiers. L’urgence a alors laissé la place à une sensation de flottement, des injonctions contradictoires, une absence de prise en compte de l’état d’esprit des personnels de terrain.
Ainsi donc, malgré la multiplicité des crises des dernières années, notre administration n’a toujours pas convié les représentant.es des personnels à discuter d’un protocole que nous pourrions établir ensemble, et qui définirait la marche à suivre en cas de situation dégradée, en tenant compte des spécificités de chaque terrain. Au vu des choix politiques qui sont faits, ces situations paraissent pourtant les conséquences logiques et prévisibles de l’absence de dialogue et de l’imposition par la force d’un projet néo-libéral d’une rare violence engagé depuis plusieurs années.
Une fois la stupéfaction et la désolation passées après avoir constaté les dégâts matériels dans nos locaux ou ceux de nos collègues, nous pensons qu’une réflexion profonde doit s’ouvrir sur le rôle de la Justice de notre pays. Plus encore celui que nous, professionnels œuvrant à l’insertion ou la réinsertion des personnes placées sous-main de justice, devons jouer.
Il faut malheureusement reconnaître que ces évènements ne constituent finalement pas une surprise. Après les gilets jaunes, l’opposition à la réforme des retraites, les mouvements écologistes, ce sont désormais les quartiers populaires qui se soulèvent et s’embrasent.
Le lien entre ces mobilisations est l’expression d’un mécontentement et d’une demande forte de changement de paradigme concernant les orientations politiques néo-libérales menées depuis une quinzaine d’années: démantèlement des services publics, contexte économique d’appauvrissement, d’inflation, de hausse des loyers, hausse du prix de l’énergie, hausse de l’alimentaire, réforme du RSA, réforme du chômage…
La seule réponse gouvernementale qui est apportée aux inquiétudes soulevées par la population : la répression, la violence sociale et institutionnelle à tout prix. Quitte à jeter l’opprobre sur toutes les formes de contre-pouvoirs, notamment en cédant toujours plus de terrain à ceux qui réclament une Justice expéditive et elle aussi répressive jusqu’à l’outrance.
L’institution judiciaire quant à elle se retrouve une fois encore prise dans cet engrenage toujours plus féroce. Des centaines de personnes ont été jugées de manière expéditive et les placements en détention provisoire ou les peines d’emprisonnement fermes et non aménageables se sont multipliées ces derniers jours. Une majorité d’entre elles sanctionnent des jeunes inconnus jusqu’ici de la Justice, qui vont donc découvrir les conséquences que nous savons tous dramatiques de l’incarcération. Elles paraissent constituer la seule réponse politique envisagée par un gouvernement sourd aux problèmes réels et profonds montrés du doigt par ces soulèvements.
Ainsi, malgré les discours de façade sur les mesures législatives visant à « vider les prisons », la surpopulation carcérale n’a jamais été aussi importante. Les conséquences de cette gestion des établissements pénitentiaires sont pourtant connues de tous, à commencer par notre administration. Paupérisation, exclusion, violence…
Nous ne connaissons que trop bien les leviers qui mènent à la récidive. Le désœuvrement, le désespoir, l’absence de perspectives, l’impression pour les plus fragiles de ne jamais être écoutés, d’être laissés pour compte, une Justice forte avec les faibles mais faible avec les forts, et pour seule réponse politique la violence classiste, systémique et étatique couplée par l’absence de transparence voire le mensonge, ne peuvent conduire qu’à des réactions extrêmes et conflictuelles.
Nous avons assisté, consternés, au ballet écœurant des réactions ayant suivi la mort de Nahel. Des saillies de deux syndicats policiers en appelant quasiment à la guerre civile, voire au coup d’Etat, à l’ouverture d’une cagnotte servant de récupération ignoble de l’évènement. Toutes deux n’ont eu en réponse qu’un silence assourdissant de la part du pouvoir, qui préfère polémiquer sur les responsabilités des parents, des réseaux sociaux, ou des jeux vidéo, dans cette explosion sociétale, alors pourtant que ces sorties piétinent le fondement-même de notre société.
Dès lors, nous nous interrogeons sur le rôle qui nous est réservé dans ce processus. Comment travailler correctement lorsque les prisons se remplissent toujours davantage, pour l’essentiel de jeunes, jamais condamnés et pour partie insérés, emprisonnés pour des « courtes peines » qui ne sont accompagnées d’aucune mesure en milieu ouvert à l’issue de l’incarcération ? Comment faire pour rétablir une confiance brisée entre notre institution et des citoyens qu’elle sanctionne plus qu’elle ne protège ? Comment résister aux attaques d’une violence inouïe contre la Justice, propagées par des personnes que l’on dit «en responsabilité» mais qui jouent constamment aux pyromanes ?
A nos yeux, notre institution voit son rôle dévoyé. Elle se met au service d’un ordre social voulu par des gouvernants qui déroulent leur projet à marche forcée, avec une violence extrême. Le tout en laissant les propos et les actes racistes, classistes, sexistes ou plus généralement intolérables s’imposer progressivement dans les esprits.
Il est grand temps d’enfin regarder en face la réalité d’un système qui se fait de plus en plus répressif mais de moins en moins efficace en matière de lutte et de prévention de la récidive. Il est grand temps de poser des mots sur les maux profonds traversés dans notre pays, et au sein de laquelle un système judiciaire à l’agonie a pour charge de tenter de réparer les pots cassés.
Nous n’avons pas à assumer les responsabilités du gouvernement actuel concernant le contexte inédit de mobilisation qui a ouvert la première année de mandat de ce gouvernement !
Tout en assurant les personnels des établissements touchés par les conséquences des évènements survenus ces derniers temps de notre soutien plein et entier, nous formulons, dans l’optique d’un apaisement réel et durable, les propositions suivantes :
Reprise d’un dialogue social permettant d’établir, à minima et en concertation avec les représentant.es du personnel, des protocoles face aux situations de crise auxquelles les services peuvent être confrontés.
Arrêt des directives ministérielles transmises aux procureurs et aux magistrats à appliquer systématiquement suite aux interpellations en lien avec les incidents suite aux mouvements sociaux.
Réelle prise en compte des violences policières avec des procédures internes de recueil et de traitement de ces infractions au niveau du ministère de la justice.
Restauration des règles élémentaires visant à assurer une Justice équitable, non discriminatoire et impartiale, en cessant avec cette logique d’abattage que sont les comparutions immédiates à la chaîne et/ou les placements en détention provisoire, lorsque des solutions alternatives existent.
Instaurer un numérus clausus en détention.
Favoriser les peines de probation en milieu ouvert, qu’elles constituent des aménagements de l’emprisonnement ou soient probatoires, afin de permettre de s’assurer de l’évolution des personnes suivies dans leur quotidien et d’assurer le retour progressif des personnels des SPIP sur les terrains. La peine ferme ne doit plus être la peine de référence.
Etablir une stratégie de désescalade axée autour de politiques de prévention et des moyens donnés aux acteurs de terrain pour pouvoir durablement et efficacement lutter contre les leviers provoquant la récidive de passage à l’acte délinquant.
A Paris, le 7 juillet 2023 SOLIDAIRES-JUSTICE IDF SNEPAP-FSU IDF CGT INSERTION ET PROBATION IDF
Vous trouverez ci-dessous le tract intersyndical CGT-SOLIDAIRES-UFAP sur la situation de l’équipe « milieu fermé » du SPIP 84 à l’antenne du CP Le Pontet
[ Solidaires-Justice « Ile-de-France » ] [mise à jour du 7 février 2023]
Privé.e.s abusivement du droit constitutionnel de faire grève, les personnels des SPIP ont néanmoins décidés de se mobiliser et de faire savoir à leur administration et au gouvernement leur opposition à ce projet de réforme.
Elles et eux entrent en lutte contre la réforme des retraites !
Ainsi, en Ile-de-France, dans des intersyndicales que nous souhaitons les plus larges possibles, les représentant.e.s et militant.e.s de Solidaires-Justice appellent partout à des AG, à organiser des HMI, afin de permettre aux agent.e.s d’échanger et de décider collectivement, des actions, de mobilisations et de soutiens, à mettre en oeuvre pour participer à cette lutte.
Tous et toutes en mobilisé.e.s, dans les AG, dans les mobilisations et les manifestations !
La participation à ces réunions est déjà significative et encourageante !
Restons mobilisé.e.s !
Toutes et tous agissons pour défendre nos retraites :
Les 7 et 11 février prochains
ON LACHE RIEN !
Mise à jour du 7 février 2023 :
Les SPIP 75, 91 et 95 ont poursuivent la mobilisation. Dans ces 3 services, les agents, sous couvert de leurs intersyndicales – auxquelles Solidaires-Justice participe – ont écrit à l’ensemble des parlementaires, député.e.s, sénateurs et sénatrices, pour leur fait part de leur opposition à ce projet et des risques que feraient peser sur elles et eux la concrétisation d’une telle réforme.
Par ailleurs, dans le 91 et dans le 95, des AG se sont tenues symboliquement ce 7 février, au cours desquelles les personnels ont tenu à réaffirmer leur opposition à cette réforme et leur mobilisation :
[ Tract de l’intersyndicale CGT – UFAP – SOLIDAIRES du SPIP 84 ]
C’est l’histoire d’une équipe qui croyait encore au Père Noël
« Et c’est ainsi que sonna l’heure des résolutions »
Cher Père Noël,
En 2022, les agents de l’équipe du SPIP 84 en milieu fermé ont été très sages, mais surtout très professionnelles, en témoignent nos évaluations et nos notations. Alors nous ne comprenons pas pourquoi, tu n’as exaucé aucun souhait de notre liste.
Nous demandions simplement :
Un service organisé, avec des procédures et des consignes claires afin que la qualité de notre travail ne soit pas revue à la baisse compte tenu des moyens qui nous sont donnés.
Que nos alertes auprès de notre Direction sur la surcharge de travail soient prises en compte et sans une réponse toute faite « nous aussi on est débordée ».
Le respect de nos quotités de temps de travail afin de ne pas avoir à travailler sur notre temps personnel pour finir des rapports dans les délais impartis. Tu le sais, nous te l’avons déjà dit et apparemment ça ne te pose pas de problème ???
Ne plus avoir à subir, encore une année de plus, les absences de nos collègues sans aucun renfort pour la prise en charge des dossiers (affectation d’un CPIP placé ou contractuel à TEMPS PLEIN pour pallier aux absences).
Une communication bienveillante pour mener à bien nos missions (ô combien difficiles !) dans un cadre sécurisant.
Anticiper et échanger autour de l’arrivée de la loi de confiance.
Que lors des réunions de crise, les décisions pourtant satisfaisantes prises soient appliquées, avec un compte rendu rapidement rédigé et transmis aux différents services, et que tout ça ne soit pas que des sons de cloches !!!
Et pour finir, la présence physique d’un cadre en période de fête lorsque l’équipe est réduite en plusd’un secrétariat absent, plutôt qu’un remerciement pour « avoir mouillé le maillot ».
En attendant nous ne sommes pas restées immobiles, nous avons avant tout continué de travailler de manière consciencieuse. Mais aussi nous avons, tentés de rétablir le dialogue et rappeler à notre Direction ses engagements, sollicité la psychologue et la médecine du travail puis participé à une supervision et enfin, alerté les différentes organisations syndicales.
La liste peut te paraître longue mais nous t’avions pourtant adressé les mêmes demandes en décembre 2021, quelle déception encore une fois ! Et pourtant nous t’avons fait confiance…
Tu nous as menti Père Noël ! Notre équipe se sent seule, elle n’est toujours pas soutenue et souffre toujours. NOUS devons nous rendre à l’évidence : tu n’existes pas !!!
En 2023 afin de se préserver et de survivre dans notre quotidien, noussommes contraints de prendre les résolutions suivantes :
Nous ne participerons plus physiquement aux CPU : évidemment, tu nous connais, nous rendrons quand même nos avis écrits afin de respecter les engagements de la labellisation.
Nous ne participerons plus aux réunions institutionnelles tant que les décisions actées ne seront pas appliquées.
Nous ne participerons plus aux évaluations des stagiaires. Nous n’interviendrons plus dans les champs transversaux.
Nous continuons de réfléchir à comment faire le deuil de ton inexistence …
C’est ainsi que l’équipe du SPIP en milieu fermé a cessé de croire au Père Noël.
Moralité : quand tu ne peux plus croire au Père Noël, compte sur toi-même !