Le 24 novembre 2021 dernier, nous dénoncions auprès du président de ce tribunal le détournement des moyens de vidéosurveillance conduisant la direction du greffe à surveiller les agents plutôt que d’assurer leur sécurité. Deux mois après rien ne semble vouloir bouger… Solidaires-justice a donc saisi de nouveau la présidence et a invité les agent.e.s à saisir la CNIL pour faire valoir leurs droits !
Monsieur le Président,
Par courrier en date du 24 Novembre 2021, notre organisation syndicale vous a interpelé concernant l’usage détourné des caméras de surveillance par la directrice de greffe du Tribunal Judiciaire de Sens à partir de son poste de travail.
Les contrôles récurrents effectués par la directrice de greffe évoqués dans les écrits des agents qui vous ont été transmis mais aussi par le personnel de sécurité les plaçant quotidiennement sous surveillance, ont engendré une véritable souffrance au travail pour l’ensemble des professionnels.
Dans notre précédente saisine, nous vous avions rappelé que les caméras étaient des outils légitimes pour assurer la sécurité des biens et des personnes, et qu’en aucun cas ils ne pouvaient conduire à placer le personnel sous surveillance constante et permanente ; enfin nous avions sollicité afin que vos services mettent dans les meilleurs délais un terme au contrôle des caméras de surveillance de la part de la directrice de greffe à partir de son poste de travail.
A ce jour, nous n’avons pas eu de retour de la part de vos services concernant ladite requête.
Par conséquent, nous tenons donc à vous rappeler que les employeurs publics doivent respecter les principes généraux de prévention de l’article L.4121 – 2 du code du travail. Ainsi, ayant la compétence pour prendre les mesures au bon fonctionnement de l’administration placé sous votre autorité, vous avez donc la charge en tant que Président du Tribunal Judiciaire de Sens de veiller à la sécurité et à la protection des agents placés sous votre autorité notamment de prendre toutes les mesures pour éviter les risques professionnels, les évaluer, les combattre à la source.
Au vu de de ces éléments favorisant les risques psycho-sociaux de l’ensemble du personnel, nous vous saurions gré de retirer tout accès aux caméras de surveillance à partir de du poste de travail de la directrice de greffe du tribunal judiciaire.
Pour télécharger le courrier, cliquer sur l’image :
Notre organisation syndicale a interpellé, ce 24 novembre 2021, le président du tribunal judiciaire de Sens au sujet de la situation de souffrance au travail des personnels de cette juridiction.
En effet, suite à notre visite du 16 novembre 2021 sur place, plusieurs agent.e.s nous ont alertés sur leur condition de travail et les méthodes de leur directrice de greffe. Ils nous ont remis à cette occasion des courriers d’alerte déjà transmis à la présidence du tribunal et au CHSCT-D, sans retour à ce jour.
Lors de la tenue de notre réunion d’information syndicale le 16 Novembre 2021, plusieurs agents nous ont fait part de l’ambiance délétère instaurée par le comportement de la directrice de greffe :
maladresses managériales, déficit d’encadrement, épuisement des équipes, tension avec l’encadrement… auxquels s’ajoutent une surveillance et un contrôle abusif des agent.e.s qui passe notamment par l’usage détourné des caméras de vidéosurveillance du site. Egalement sont mentionnées des propos humiliants, familiers, répétées remettant en cause au quotidien les compétences et qualités professionnelles des agent.e.s du greffe.
Solidaires-Justice a tout d’abord demandé à ce qu’il soit mis fin immédiatement à la pratique par laquelle la directrice de greffe détourne de leur usage les caméras de vidéosurveillance.
Par ailleurs, au vu de l’ensemble des éléments qui nous ont été communiqués, nous avons demandé que des mesures soient prises avec les différents acteurs chargés de prévention (médecin de prévention, CHSCT-D, etc.) afin de répondre à la situation de souffrance au travail du personnel du tribunal judiciaire de Sens. Egalement, nous avons demandé qu’une enquête soit diligentée concernant les pratiques de gestion du personnel de la directrice de greffe, dont les méthodes sont à l’origine de cette souffrance au travail et facteurs de risques psychosociaux depuis plusieurs années, comme l’atteste un premier rapport de la cellule de prévention des RPS datant de 2018 !
Contribution syndicale (1) au miroir de la crise sanitaire
Un droit à compensation inscrit dans la loi du 11 février 2005…
Le droit à la compensation – article 11 de la loi du 11 février 2005 – est un dispositif spécifique ou un ensemble de mesures apportées à une personne reconnue RQTH (reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé). Cette approche d’inclusion sociale vise l’amélioration de la vie quotidienne et sociale, quels que soient l’origine et la nature de la déficience, l’âge ou le mode de vie.
Au travail, cette compensation se décline de la formation à l’accès à la retraite, en passant par le recrutement, la carrière… et bien-sur l’activité professionnelle au quotidien, objet de cette contribution. La compensation ne se résume pas à une prestation financière ou à un aménagement technique de poste. Elle doit être appliquée tant en matériel adapté qu’en aménagement de temps de travail et d’objectifs assignés et/ou d’accompagnement humain, sans pour autant pénaliser les équipes.
Cet état des lieux inclut un retour d’expérience d’une année d’activité sous la contrainte de la crise sanitaire Covid 19, sachant que sur cette actualité, comme souvent, celles et ceux en situation de handicap, « bénéficient » d’un effet loupe des difficultés rencontrées par une personne lambda.
…mais une application actuellement insuffisante dans nos administrations
La modernisation de la fonction publique conduit à supprimer davantage d’effectifs. Aujourd’hui, ce manque d’effectifs allant de pair avec une charge de travail doublée d’une exigence croissante et d’une crise sanitaire sans précédent crée un climat tendu dans certains services, générant parfois des conflits entre collègues. Cette situation préoccupante incite des Directions à renforcer leur « cellule des agents en difficulté », mais ce faisant, ne traitent que de la partie émergée de l’iceberg, sans s’inscrire dans une démarche de prévention.
Parmi les agents en souffrance se cachent notamment des agents en situation de handicap ou en arrêt de longue maladie. La proportion correspondant aux agents en difficulté n’est ni dévoilée, ni recensée.
Face à la Covid, les employeurs développent le télétravail. Mais, en télétravail, les collègues en situation de handicap ne disposent pas toujours des outils nécessaires à l’exercice de leur activité professionnelle : L’adaptation du poste de travail, acquise dans l’établissement, peut ne pas être facilement transposable ; le coût d’un aménagement double constitue un frein à l’adaptation de ce second poste…
L’autre difficulté, partagée avec toutes les personnes en télétravail, est l’isolement. Mais, cette situation de travail isolée s’avère plus stressante lorsque son handicap empêche d’effectuer soi-même une réparation de routine ou une opération annexe… Cet isolement devient encore un handicap supplémentaire, lorsque qu’on est contraint au télétravail sur un temps long, du fait de mesures de prévention liées à la crise sanitaire en tant que personne à risque. Certains employeurs, dans un esprit parfois bienveillant, incitent même ces collègues à basculer en télétravail permanent ; ce qui a aussi l’effet de les éloigner durablement du collectif professionnel et des liens sociaux générés sur le lieu de travail. Bonjour l’isolement !
Une priorité, renforcer l’accompagnement de proximité
Compte tenu des situations individuelles préoccupantes, ce rôle de correspondant/référent handicap de terrain est une nécessité absolue, jusqu’au temps plein, si l’effectif l’exige. Toute prise en charge ou compensation du handicap implique comme condition sine qua non de créer localement, voire sur chaque site, une fonction de référent ou correspondant, occupée par une personne compétente et suffisamment formée pour être force de propositions et de solutions.
D’une façon générale, l’expérience démontre que tout le « système » est organisé pour présupposer, par exemple, que seul le collègue handicapé peut être en souffrance. Or, selon le contexte, la nature du handicap et la prise en compte ou non de la compensation, c’est potentiellement tout l’entourage qui peut être en souffrance avec comme conséquences des situations conflictuelles entre agents.
Il est urgent que le droit à la compensation soit appliqué dans toutes ses dimensions, ce qui induit :
Un-e référent-e handicap de proximité, en capacité d’intervenir sur chaque site pour s’assurer du bien-être au travail des personnes en situation de handicap et de leurs collègues. Il/elle sera le mieux placé pour inciter les responsables et les équipes à se former à l’accueil et, plus largement, à assurer une veille sur l’évolution des dispositifs. Cette fonction doit s’inscrire dans le cadre d’une mission formalisée avec décharge horaire. Au vu de l’évolution du contexte, comme dans la période de pandémie que nous traversons, cette proximité permet d’ajuster si nécessaire, rapidement, « l’aide humaine » nécessaire à la vie quotidienne au travail ou de vérifier, par exemple, que des masques adaptés (transparents) soient à disposition des déficients auditifs (et de leur entourage) ou visuels…
Un aménagement du temps de travail pour les collègues en situation de handicap (journées de travail à durée réduite définie par la médecine de prévention (2), afin de tenir compte de la fatigue liée au handicap, non subie par les autres collègues) ; flexibilité de la charge de travail selon l’état physique et psychique de l’agent ; adaptation du temps de travail de l’agent aux RDV médicaux contraints (sans devoir poser une demi-journée de congé)…
Une adaptation des postes de travail, actuellement bien avancée lorsqu’il s’agit de l’aménagement du poste dans l’entreprise, mais intégrant aussi celui occupé en télétravail. L’accessibilité des lieux communs (toilettes, restauration, parking…) demeure encore souvent partielle. Pour viser l’autonomie, les moyens financiers nécessaires doivent être débloqués. Une charge de travail adaptée aux différents handicaps et à leurs évolutions pour chaque agent (répartition des missions et des tâches, limitation des ports de charges lourdes, interdiction d’accès à certains lieux dangereux…).
Au-delà de l’accompagnement de proximité, priorité actuelle au vu du contexte de crise sanitaire, la qualité de cette compensation passe par le dégagement de moyens supplémentaires pour l’ensemble des professions impliquées par le suivi du handicap (médecine du travail, ergonomie, prévention…) et par la sauvegarde des missions des CHSCT, mises en péril par le gouvernement.
(1) Cette contribution n’est hélas pas exhaustive des difficultés aujourd’hui rencontrées par celles et ceux en situation de handicap dans la fonction publique. Elle a été initiée au sein du réseau des mandaté-es Solidaires dans les Comités du FIPHFP (Fonds pour l’Insertion des Personnes Handicapées dans la Fonction Publique) et bénéficie des illustrations du dessinateur Jo
(2) Dans l’Education Nationale, le ministère autorise le temps partiel compensé pour certain-es enseignant-es en situation de handicap