L’État décide de frapper au porte-monnaie les départements qui résistent au fichage des enfants

[ Action collective ]

Tout juste sorti de cette période de confinement, et alors que la crise sanitaire a fortement impacté la situation des mineur⋅es isolé⋅es, le gouvernement reprend l’offensive réglementaire à l’encontre de leurs droits.

Un décret daté du 23 juin 2020 vient d’autoriser l’État à réduire sa contribution financière aux départements qui refusent de faire intervenir les préfectures dans le processus d’évaluation et d’identification de ces enfants.

Pour mémoire, ce sont la loi Collomb de septembre 2018 et son décret d’application du 30 janvier 2019 qui ont institué un fichier des mineur⋅es isolé⋅es permettant aux départements d’associer les préfectures à la détermination de leur minorité, et de faciliter l’éloignement de celles et ceux qui auront fait l’objet d’une décision provisoire de non-admission à l’aide sociale à l’enfance.

L’ensemble du secteur de la protection de l’enfance – et en particulier le Conseil national de la protection de l’enfance –, ainsi que la totalité des organisations qui se sont exprimées sur le sujet, ont dénoncé la confusion entre protection de l’enfance et lutte contre l’immigration irrégulière organisée par ce dispositif. Malgré quelques réserves, le Conseil constitutionnel et le Conseil d’État l’ont malheureusement validé.

Un an après son entrée en vigueur, environ un tiers des départements, pour des motifs divers et variés, continue à refuser d’appliquer ce dispositif.

Aussi, à défaut de pouvoir contraindre l’ensemble des départements à conclure avec les préfectures une convention permettant de vérifier si ces enfants figurent déjà dans deux fichiers destinés au contrôle migratoire (Visabio et AGDREF) et de les inscrire dans un troisième, dénommé

« appui à l’évaluation de la minorité » (AEM), le gouvernement a décidé de les frapper au porte-monnaie.

Ainsi, il recourt à présent au chantage financier pour contraindre les derniers départements réfractaires à ce mélange des genres. Ce faisant, il fait montre de son acharnement pour imposer sa logique du soupçon et du contrôle à la question de l’accueil et de la protection des mineur⋅es isolé⋅es.

Nos organisations demandent l’abrogation de ce décret, la mise en œuvre du premier accueil, l’accompagnement socio-éducatif des jeunes isolé⋅es, sans discrimination et dans le strict cadre de la protection de l’enfance.

Paris, le 7 juillet 2020

Signataires :

  • CGT
  • DEI France
  • Fédération SUD Collectivités Territoriales
  • Fédération SUD Santé Sociaux
  • FSU
  • Gisti
  • La Cimade
  • Ligue des droits de l’Homme
  • Unicef
  • SNPES-PJJ/FSU
  • SNUASFP-FSU
  • SNUTER-La FSU Territoriale
  • Solidaires
  • Solidaires-Justice
  • Syndicat des Avocats de France
  • Syndicat Magistrature

Prise en charge pénitentiaire des personnes « radicalisées »

[ Le rapport très critique de la CGLPL ]

Dans son rapport rendu public le 10 juin dernier, la contrôleuse générale des lieux privatif de liberté (CGLPL) pointe notamment notamment une « uniformisation » de la prise en charge, des critères « opaques » et des atteintes aux libertés…

Nous partageons toutes les réserves émises et dénonçons la doctrine de l’administration qui bafoue les droits des PPSMJ et met en difficulté les agents !


Cliquer sur l’image pour lire le rapport :

Abandon du Code de la justice pénale des mineurs : Pour une réforme ambitieuse et la création d’un Code de l’enfance

[ Communiqué collectif ]

Des personnalités et des professionnel-les de l’éducation, de la protection de l’enfance et de la justice demandent aux parlementaires un abandon du projet de code de la justice pénale des mineurs afin de mettre en place un vrai débat pour construire ensemble un code de l’enfance !

Le 12 mai 2020, plus de 500 personnalités, professionnels de l’enfance en danger, des acteurs associatifs, des citoyens, nos organisations syndicales et professionnelles interpellaient la garde des Sceaux et les Parlementaires en leur demandant l’abandon pur et simple du projet de Code de la justice pénale des mineurs.

Pour « reconstruire un projet plus ambitieux, en se laissant le temps d’une véritable démarche de consensus, et ainsi de faire aboutir un code non pas seulement de la justice pénale des mineur.e.s, mais de l’enfance et ainsi de replacer la protection de nos enfants au centre des enjeux. »

Car l’urgence n’est pas de voter le report d’un code de la justice pénale des mineurs de quelques mois, ce qui ne remédiera pas aux manques criants de la justice des mineurs : des moyens humains, matériels et financiers, permettant aux professionnels d’exercer pleinement leurs missions de protection de l’enfance en danger. Par ailleurs, les deux mois de confinement ont rendu la situation des juridictions pour enfants intenable en terme de cumul d’activité et rendent difficile voire impossible la mise en œuvre du Code de la justice pénale des mineurs pour le mois de mars 2021.
Certains présidents de juridictions et de nombreux magistrats l’ont constaté.

Au contraire, et encore plus à ce jour, l’urgence est de remettre l’enfant au centre du débat.

L’urgence est de se donner le temps et les moyens d’un véritable débat parlementaire, avec tous les acteurs et actrices de la justice civile et pénale des mineur.e.s.

Certains parlementaires l’ont entendu : en proposant au Sénat un amendement invitant le gouvernement « à renoncer à la partie législative de son ordonnance et à organiser le débat parlementaire autour d’un projet de loi élaboré en concertation avec tous les acteurs qui en ont largement exprimé la demande ».
Si cet amendement a été rejeté, rien n’est encore fait !

Alors que le nouveau projet de loi sur les dispositions urgentes face à l’épidémie de covid-19 est toujours en discussion entre les deux Chambres, il est encore temps d’agir et de prendre les mesures nécessaires !

Donnons-nous les moyens et l’ambition, en abandonnant le projet de code de la justice pénale des mineurs, de penser ensemble et d’adopter dans un consensus le plus large possible un véritable Code de l’enfance !

La Ligue des Droits de l’Homme, la CGT, le Syndicat de la magistrature, le Syndicat des avocats de France, le SNPES PJJ/FSU, la FSU, l’OIP, Union syndicale Solidaires, Solidaires Justice, SNUAS-FP/FSU, Fédération Sud santé sociaux, SNUTER la FSU territoriale, SNEPAP FSU, Fédération Sud Collectivités Territoriales , DEI France, la FCPE.

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Communiqué Collectif Justice des enfants: abandon du CJPM

Depuis deux ans nos organisations s’opposent à l’abrogation de l’ordonnance du 2 février 1945 qui régit la justice des enfants. Le 2 février dernier, nous fêtions les 75 ans de ce texte fondateur et innovant issu du Conseil National de la Résistance, qui a posé les jalons d’une justice des enfants dans laquelle l’éducation doit primer sur la répression. Déjà 40 fois amendé pour le rendre toujours plus répressif, l’actuel gouvernement a signé sa mise à la retraite d’office sans concertation, dans une urgence artificielle en édictant, par ordonnance du 11 septembre 2019, un Code de la Justice pénale des mineurs (CJPM) censé entrer en vigueur, après ratification du Parlement, le 1er octobre 2020. Ce code qui se veut « à droit constant » et dont les objectifs affichés étaient d’améliorer la lisibilité et la rapidité de la justice des enfants, ne fait qu’affirmer les politiques répressives de ces 20 dernières années.

Mais voilà que survient la crise sanitaire. Si déjà les services de la justice de l’enfance pouvaient s’inquiéter du maintien de l’échéance du 1er octobre 2020, il est désormais certain que personne ne sera prêt à temps.

La Garde des Sceaux souhaite reporter l’entrée en vigueur de ce texte de quelques mois. Mais ces « quelques mois », même une année, ne suffiront pas.

Car l’urgence sanitaire actuelle a mis en exergue que les politiques d’austérité de ces 30 dernières années ont eu un effet dévastateur sur les services publics en général. Elle est venue exacerber toutes les difficultés déjà criantes, que nous avons maintes fois signalées, dont le manque de moyens humains et financiers.
La prise en charge des enfants en danger n’est non seulement pas une priorité politique mais a servi de variable d’ajustement des budgets. Que cela soit en prévention, en protection ou en matière pénale, l’enfant en difficulté a été sacrifié. La détresse des professionnels intervenant dans le champ de l’enfance en danger et la dégradation de la prise en charge des enfants sous main de justice sont les conséquences directes de ces choix politiques.

Ainsi la priorité n’est pas la mise en œuvre, même différée, du Code de la justice pénale des mineurs mais bien de redonner les moyens humains et matériels à l’ensemble des acteurs et actrices de l’enfance en danger pour assurer pleinement les missions de protection de l’enfance.

Dans l’urgence, les professionnels ont montré qu’il était possible, avec les textes dont nous disposons déjà, de faire autrement que le tout répressif prôné depuis 20 ans maintenant : diminution drastique du nombre d’enfants en garde à vue, et donc présentés en justice, alternative aux poursuites, sorties de détention…
Ces initiatives ont démontré que le projet que nos organisations portent depuis le début est réaliste, réalisable et souhaitable et que la réforme envisagée n’est pas utile pour y parvenir.

Si nous avons pu changer notre rapport à la justice des enfants depuis le confinement, nous pouvons le faire durablement.

Aussi, nos organisations, des personnalités et des professionnels de l’enfance en difficulté, demandent l’abandon pur et simple du Code de la justice pénale des mineurs.

Il est temps de construire un projet plus ambitieux, celui d’un Code de l’enfance, en matière civile comme pénale, qui puisse rendre à l’ordonnance du 2 février 1945 sa visée éducative et protectrice et se donne les moyens de mettre en œuvre une justice humaniste, bienveillante, sociale et éducative, dans l’intérêt supérieur des enfants, considération primordiale consacrée par l’article 3 de la Convention Internationale des Droits de l’Enfant, depuis plus de 30 ans.

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