Contribution syndicale (1) au miroir de la crise sanitaire
Un droit à compensation inscrit dans la loi du 11 février 2005…
Le droit à la compensation – article 11 de la loi du 11 février 2005 – est un dispositif spécifique ou un ensemble de mesures apportées à une personne reconnue RQTH (reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé). Cette approche d’inclusion sociale vise l’amélioration de la vie quotidienne et sociale, quels que soient l’origine et la nature de la déficience, l’âge ou le mode de vie.
Au travail, cette compensation se décline de la formation à l’accès à la retraite, en passant par le recrutement, la carrière… et bien-sur l’activité professionnelle au quotidien, objet de cette contribution. La compensation ne se résume pas à une prestation financière ou à un aménagement technique de poste. Elle doit être appliquée tant en matériel adapté qu’en aménagement de temps de travail et d’objectifs assignés et/ou d’accompagnement humain, sans pour autant pénaliser les équipes.
Cet état des lieux inclut un retour d’expérience d’une année d’activité sous la contrainte de la crise sanitaire Covid 19, sachant que sur cette actualité, comme souvent, celles et ceux en situation de handicap, « bénéficient » d’un effet loupe des difficultés rencontrées par une personne lambda.
…mais une application actuellement insuffisante dans nos administrations
La modernisation de la fonction publique conduit à supprimer davantage d’effectifs. Aujourd’hui, ce manque d’effectifs allant de pair avec une charge de travail doublée d’une exigence croissante et d’une crise sanitaire sans précédent crée un climat tendu dans certains services, générant parfois des conflits entre collègues. Cette situation préoccupante incite des Directions à renforcer leur « cellule des agents en difficulté », mais ce faisant, ne traitent que de la partie émergée de l’iceberg, sans s’inscrire dans une démarche de prévention.
Parmi les agents en souffrance se cachent notamment des agents en situation de handicap ou en arrêt de longue maladie. La proportion correspondant aux agents en difficulté n’est ni dévoilée, ni recensée.
Face à la Covid, les employeurs développent le télétravail. Mais, en télétravail, les collègues en situation de handicap ne disposent pas toujours des outils nécessaires à l’exercice de leur activité professionnelle : L’adaptation du poste de travail, acquise dans l’établissement, peut ne pas être facilement transposable ; le coût d’un aménagement double constitue un frein à l’adaptation de ce second poste…
L’autre difficulté, partagée avec toutes les personnes en télétravail, est l’isolement. Mais, cette situation de travail isolée s’avère plus stressante lorsque son handicap empêche d’effectuer soi-même une réparation de routine ou une opération annexe… Cet isolement devient encore un handicap supplémentaire, lorsque qu’on est contraint au télétravail sur un temps long, du fait de mesures de prévention liées à la crise sanitaire en tant que personne à risque. Certains employeurs, dans un esprit parfois bienveillant, incitent même ces collègues à basculer en télétravail permanent ; ce qui a aussi l’effet de les éloigner durablement du collectif professionnel et des liens sociaux générés sur le lieu de travail. Bonjour l’isolement !
Une priorité, renforcer l’accompagnement de proximité
Compte tenu des situations individuelles préoccupantes, ce rôle de correspondant/référent handicap de terrain est une nécessité absolue, jusqu’au temps plein, si l’effectif l’exige. Toute prise en charge ou compensation du handicap implique comme condition sine qua non de créer localement, voire sur chaque site, une fonction de référent ou correspondant, occupée par une personne compétente et suffisamment formée pour être force de propositions et de solutions.
D’une façon générale, l’expérience démontre que tout le « système » est organisé pour présupposer, par exemple, que seul le collègue handicapé peut être en souffrance. Or, selon le contexte, la nature du handicap et la prise en compte ou non de la compensation, c’est potentiellement tout l’entourage qui peut être en souffrance avec comme conséquences des situations conflictuelles entre agents.
Il est urgent que le droit à la compensation soit appliqué dans toutes ses dimensions, ce qui induit :
- Un-e référent-e handicap de proximité, en capacité d’intervenir sur chaque site pour s’assurer du bien-être au travail des personnes en situation de handicap et de leurs collègues. Il/elle sera le mieux placé pour inciter les responsables et les équipes à se former à l’accueil et, plus largement, à assurer une veille sur l’évolution des dispositifs. Cette fonction doit s’inscrire dans le cadre d’une mission formalisée avec décharge horaire. Au vu de l’évolution du contexte, comme dans la période de pandémie que nous traversons, cette proximité permet d’ajuster si nécessaire, rapidement, « l’aide humaine » nécessaire à la vie quotidienne au travail ou de vérifier, par exemple, que des masques adaptés (transparents) soient à disposition des déficients auditifs (et de leur entourage) ou visuels…
- Un aménagement du temps de travail pour les collègues en situation de handicap (journées de travail à durée réduite définie par la médecine de prévention (2), afin de tenir compte de la fatigue liée au handicap, non subie par les autres collègues) ; flexibilité de la charge de travail selon l’état physique et psychique de l’agent ; adaptation du temps de travail de l’agent aux RDV médicaux contraints (sans devoir poser une demi-journée de congé)…
- Une adaptation des postes de travail, actuellement bien avancée lorsqu’il s’agit de l’aménagement du poste dans l’entreprise, mais intégrant aussi celui occupé en télétravail. L’accessibilité des lieux communs (toilettes, restauration,
parking…) demeure encore souvent partielle. Pour viser l’autonomie, les moyens financiers nécessaires doivent être débloqués. Une charge de travail adaptée aux différents handicaps et à leurs évolutions pour chaque agent (répartition des missions et des tâches, limitation des ports de charges lourdes, interdiction d’accès à certains lieux dangereux…). - Au-delà de l’accompagnement de proximité, priorité actuelle au vu du contexte de crise sanitaire, la qualité de cette compensation passe par le dégagement de moyens supplémentaires pour l’ensemble des professions impliquées
par le suivi du handicap (médecine du travail, ergonomie, prévention…) et par la sauvegarde des missions des CHSCT, mises en péril par le gouvernement.
(1) Cette contribution n’est hélas pas exhaustive des difficultés aujourd’hui rencontrées par celles et ceux en situation de handicap dans la fonction publique. Elle a été initiée au sein du réseau des mandaté-es Solidaires dans les Comités du FIPHFP (Fonds pour l’Insertion des Personnes Handicapées dans la Fonction Publique) et bénéficie des illustrations du dessinateur Jo
(2) Dans l’Education Nationale, le ministère autorise le temps partiel compensé pour certain-es enseignant-es en situation de handicap
Liens utiles :
Pour l’accès aux interventions du FIPHFP, voire le saisir directement ;
Pour déposer un recours au Défenseur des droits face aux discriminations ;
Sans oublier son contact Solidaires de proximité, à défaut le syndicat de son champ professionnel.
Pour télécharger ce document Solidaires Fonction-Publique, cliquer sur la miniature :
Bonjour,
je suis fonctionnaire RQTH depuis 2003, en qualité de faisant fonction de greffier depuis 2010, près la cour d’appel d’Orléans, sans compensation financière aucune alors que j’exerçais ce poste près la chambre sociale et tiens à ce jour la chambre des urgences à part entière depuis le 1er novembre 2017. J’ai 65 ans au 31/08/2021, et dois travailler jusqu’ à 67 ans pour obtenir une maigre retraite. La manutention, port de charges et le stress me sont proscrits mais…est-ce possible quand on va aux audiences avec plus de 12 dossiers voire plus…une fois par semaine sans compter la manutention au quotidien. Je rage que jamais malgré un entretien d’évaluation enrubanné d’ « excellents » jamais une NBI ou ??? …autre proposition d’équilibre… (AH si le CIA une fois par an…à raison de environ 19 € mensuels…sic…quand le partage le permet…sic…) ne peut me faire oublier au quotidien la différence salariale avec mes collègues qui ont des tâches similaires, quantité et qualité confondues, sans compter le tutorat au fil des années de jeunes rerues et d’étudiants en stage, tout cela parce que entrée à 52 ans près la justice en détachement administratif en qualité de RQTH, je n’ai pas pu pour des raisons financières (un fils adulte en étude et ensuite au chômage à charge à l’époque) et une santé précaire physique et nerveuse furent une entrave pour entrer dans le cursus de VAE pour le poste de greffier . Mais je pratique quand bien même cette fonction depuis 2010 au civil, 11 ans au final de différence salariale impactant ma pauvre retraite de plus et mon mental !